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AUXERRE

Une nécropole antique de très jeunes enfants et mort-nés d’une conservation inhabituelle à Auxerre

Depuis février 2024, sur prescription de l’État (DRAC Bourgogne–Franche-Comté), les archéologues de l’Inrap mènent des recherches sur la place du Maréchal Leclerc à Auxerre en amont de son réaménagement paysager. Ces premières fouilles dans le centre historique de la ville retracent l’évolution de ce quartier urbain de l’Antiquité romaine jusqu’au XIXe siècle. Parmi les vestiges, l’enceinte fortifiée (castrum) du IVe siècle est le témoin de la refondation de la ville d’Autessiodurum et de son accession au rang de capitale de la nouvelle cité d’Auxerre. Cette fortification s’installe ici sur une aire funéraire du Haut-Empire (Ier-IIIe siècle) jusqu’ici inconnue pour Auxerre. Si cette nécropole s’inscrit dans les traditions gallo-romaines, elle présente de nombreuses caractéristiques qui la démarquent de ses contemporaines.

Une population particulière, des gestes associés

Suivant les règles antiques, les nécropoles sont implantées en dehors des villes,. Sur la périphérie de ces aires funéraires, des espaces peuvent être dédiés aux très jeunes enfants (les mort-nés et individus âgés de quelques mois) dont le taux de mortalité est élevé à cette période. La fouille réalisée à Auxerre explore l’une de ces zones spécifiques. Son très bon état de conservation offre l’occasion, aux archéologues, d’observer les gestes destinés à cette population très singulière. De la vaisselle céramique est volontairement brisée à côté des inhumations sur des niveaux de circulation, leur contenu étant destiné aux morts et aux dieux. D’autres objets , tels une perle, une monnaie ou une rouelle, dans une fonction prophylactique ou assimilée, accompagnent aussi le défunt. Dans un autre cas, un gobelet en céramique miniature a été déposé à la tête d’un jeune enfant.

Des pratiques funéraires variées

L’une des caractéristiques du site de la Place du Maréchal Leclerc est la grande variété des pratiques observées sur un même espace funéraire. . La majorité des inhumés est en position fœtale bien que certains soient sur le dos. Ce sont les contenants des tout-petits qui montrent le plus de diversité : ceux-ci sont disposés dans des tuiles (imbrex), des céramiques, des cercueils de bois, des écorces d’arbre, des coffrages de pierres, des textiles et autres enveloppes souples. Parfois, les corps sont simplement recouverts de fragments d’amphore pour les protéger. Dans un cas, une pierre gravée d’une rosace est réemployée pour marquer la tombe.Par ailleurs, jusqu’à huit étapes sont observées dans une inhumation, illustrant la complexité des gestes funéraires associés à ces très jeunes enfants. Ceux-ci n’étaient donc pas rejetés et leur sépulture manifestait au contraire, dans certaines occurrences, d’une attention notable.

Densité et superposition des tombes

La très forte densité des sépultures et la superposition des tombes permettent d’étudier pour l’une des premières fois un très grand nombre d’inhumations de tout-petits et autres faits funéraires des Ier-IIIe siècles. Jusqu’à cinq niveaux de tombes ont été observés, ce qui est, en l’état de la recherche, unique dans le monde gallo-romain. Ce fait est d’autant plus rare que durant l’Antiquité l’intégrité de la tombe doit être préservée. À Auxerre, certaines tombes en détruisent d’autres lors de leur installation ce qui peut être lié à un problème de place disponible mais aussi être en lien avec le statut même de ces très jeunes enfants, pas toujours perçus comme des individus à part entière.

La fouille d’Auxerre, comme récemment celle de Narbonne et d’autres, montre que l’archéologie renouvelle les approches concernant les pratiques funéraires de l’Antiquité.

Le projet d’aménagement de la place du Maréchal Leclerc

Après une prolongation des fouilles jusqu’au 21 juin, les travaux d’aménagement de l’espace public de la place du Maréchal Leclerc vont démarrer dans la foulée. Entièrement végétalisée, elle proposera en son centre une fontaine végétalisée comme choisi en 2022 par les Auxerrois lors d’une consultation. Les plantations parachèveront le chantier au printemps 2025 pour devenir un véritable poumon vert et ilot de fraîcheur en cœur de ville.

Le coût global de l’opération archéologique s’élève à 621 633 € TTC (tranche ferme, tranches conditionnelles et prolongation). Conformément à la législation, la Ville d’Auxerre a demandé une subvention à l’État (Ministère de la Culture) par l’intermédiaire du Fond National pour l’Archéologie Préventive (FNAP). La subvention allouée par l’État s’élève à 40%.